Mes vœux les meilleurs

Difficile d’y couper, à cette saison, quand on est naturellement porté à souhaiter du bon pour les autres. Mais que souhaiter aux fidèles lecteurs de mon blog ? Comment de pas tomber dans le piège des généralisations dont on sait qu’elles sont toutes fausses, y compris celle-ci bien entendu.

Mon amour de notre langue est souvent contrarié par les formulations que j’entends à cette occasion. Dans le genre pléonasme : « je vous souhaite mes meilleurs vœux ». Qu’on les exprime, qu’on les offre, qu’on les adresse, je veux bien, mais souhaiter des vœux, je demande à comprendre. Dans le genre comparatif aussi : « Meilleurs vœux ». L’absence de déterminant enlève à l’adjectif sa qualité de superlatif pour lui laisser celle de comparatif. À quoi, subséquemment on serait en droit de demander : « Meilleurs que quoi ? »

Trêve de pédanterie, j’aime cette période qui nous permet d’être orientés positivement. Disons que la vie est parfois compliquée ; il est bon qu’à échéance fixée, nous soyons invités à la voir dans le sens du bon à défaut du meilleur. Mais ce n’est pas toujours facile. Prenons quelqu’un avec qui j’ai eu quelques échanges épidermiques ayant donné lieu à des paroles regrettées ensuite. La relation n’est pas rompue pour autant, mais bien distendue. Les vœux m’invitent à laisser le passé dans le passé et à formuler comment je vois désormais notre avenir après ce passé peu glorieux. L’avenir pour lui, et pour nous deux ensemble. Ce travail d’imagination est salutaire.

Prenons un couple, autour de la nonantaine, vivant sa retraite tranquillement, avec les soucis de santé et la longueur des jours, et des nuits. Comme vais-je leur parler du bon pour eux à défaut du meilleur ? Et d’abord, que sais-je de ce qui est bon pour eux ? Qu’est-ce que je connais des leurs désirs, de leurs espoirs, de leurs rêves ? Cruelle découverte que cette ignorance qui m’handicape dans mon parler vrai vis à vis d’eux. À défaut d’exprimer mes vœux, je vais commencer par m’intéresser à eux.

Une voisine vient d’apprendre après un scanner qu’elle a une boule à côté du foie. Le médecin lui a proposé de la laisser tranquille pour les fêtes et rendez-vous a été pris pour une biopsie début janvier. D’ici là, mystère. Que lui souhaiter dans son inquiétude au-delà des formules convenues qui ne sont pourtant pas à dédaigner ? Qu’est-ce que je connais de son attitude face à la vie, face à la mort pour la rejoindre en vérité dans sa dynamique fondamentale en ce moment d’attente ?

En fait, j’aime cette période parce qu’elle m’oblige aux questions. En voulant dire du bon à quelqu’un, je suis obligé de m’interroger sur ce qui est bon pour lui. Pour lui choisir un cadeau, je vais me demander ce qui pourra lui faire plaisir. Pour les vœux, c’est pareil : qu’est-ce qu’il attend de la vie en vérité ?

On n’est plus dans les échanges matinaux météorologiques, quand nous balayons chacun la neige devant notre porte (arrêté municipal d’Amplepuis 15/01/003, article 3). Il s’agit de nous retrouver sur ce qui est bon pour nous, maintenant et pour une année au minimum en attendant « le paradis à la fin de nos jours » comme on disait dans le temps quand on croyait encore à l’enfer.

Alors, au lieu de souhaiter du bon, je préférerai être autorisé à demander à mes interlocuteurs en attente de vœux, ce qui est bon pour eux et en les assurant d’y contribuer pour ce qui dépend de moi. Non plus des vœux, pieux, mais un engagement d’aller ensemble vers un même but.

Et puisque le mot le plus fréquent dans vos retours est « interpellé » (variante : « ça me parle »), je vous souhaite de rester interpellés pendant cette année 2018, non pas tant par la prose un peu longuette de votre serviteur, que par votre entourage. Il me semble que c’est le début de la sagesse. Je vous promets, pour ce qui me concerne, d’œuvrer dans ce sens au mieux de mes moyens.

En 2018, le bonheur vous guette. Sachez y succomber. Sans retenue.

© Daniel Dubois.  Amplepuis, 2017

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